5.3.1 Introduction

Un filtre linéaire est constitué d'un opérateur, bien entendu linéaire et continu, mais aussi commutant avec les translations et ayant, dans certains cas, des propriétés d'idempotence (filtre passe-bande idéal, par exemple).

Dans une image, un objet placé au-devant de la scène occulte tous ceux qui se trouvent derrière lui dans l'axe d'observation. Pour exprimer cet aspect fondamental, on a nécessairement recours à la notion d'inclusion qui remplace, dans l'univers visuel, la structure d'additivité qui régit d'autres univers. Le filtrage morphologique constitue une alternative au filtrage linéaire. Rappelons que les filtres morphologiques ne possèdent aucune propriété de linéarité; supposons deux fonctions de gris f (x) et g(x) et une transformation morphologique $ \theta$, on aura généralement: $ \theta$(f (x) + g(x)) $ \neq$ $ \theta$(f (x)) + $ \theta$(g(x))

Nous avons vu que les ouvertures morphologiques permettaient de lisser les objets d'une image binaire. D'où l'idée d'appliquer des filtrages sur des formes ou des images en niveaux de gris. Nous allons à présent enrichir la famille des filtres non-linéaires après avoir préalablement défini quelques propriétés algébriques.

Définition 45   Par définition, un filtre algébrique est une opération croissante et idempotente:

$\displaystyle \psi$ est un filtre algébrique $\displaystyle \Leftrightarrow$ $\displaystyle \forall$f, g$\displaystyle \left\{\vphantom{ \begin{array}{l} f\leq g\Rightarrow\psi(f)\leq\psi(g)\\  \psi(\psi(f))=\psi(f)\end{array}}\right.$$\displaystyle \begin{array}{l} f\leq g\Rightarrow\psi(f)\leq\psi(g)\\  \psi(\psi(f))=\psi(f)\end{array}$ (5.5)

On peut dès lors définir une ouverture algébrique.

Définition 46   Une ouverture algébrique est un opérateur qui possède les propriétés de croissance, d'idempotence et d'anti-extensivité. Formellement,
$\displaystyle \forall$f, g,  f $\displaystyle \leq$ g $\displaystyle \Rightarrow$ $\displaystyle \psi$(f ) $\displaystyle \leq$ $\displaystyle \psi$(g) (5.6)
$\displaystyle \forall$f$\displaystyle \psi$($\displaystyle \psi$(f )) = $\displaystyle \psi$(f ) (5.7)
$\displaystyle \forall$f$\displaystyle \psi$(f ) $\displaystyle \leq$ f (5.8)

La fermeture algébrique se définit en remplaçant la propriété d'anti-extensivité par celle d'extensivité. Une ouverture morphologique est une ouverture algébrique mais l'inverse n'est pas vrai. Ainsi, il existe des ouvertures algébriques que l'on ne peut écrire sous la forme (f $ \ominus$ B) $ \oplus$ B. Les relations d'inclusion entre ouvertures sont illustrées à la figure 5.4.

Figure 5.4: Relations d'inclusion entre familles de filtres.
5682  

La propriété de croissance dresse un fort parallélisme avec les filtres linéaires, surtout sous la forme suivante:

Corollaire 47  

$\displaystyle \psi$ est croissant $\displaystyle \Leftrightarrow$ $\displaystyle \left\{\vphantom{ \begin{array}{l} \psi(f\vee g)\geq\psi(f)\vee\psi(g)\\  \psi(f\wedge g)\leq\psi(f)\wedge\psi(g)\end{array}}\right.$$\displaystyle \begin{array}{l} \psi(f\vee g)\geq\psi(f)\vee\psi(g)\\  \psi(f\wedge g)\leq\psi(f)\wedge\psi(g)\end{array}$ (5.9)

La propriété de croissance remplace l'additivité des filtres linéaires. Malheureusement, une transformation croissante produit une perte d'information; c'est pourquoi elle est irréversible. L'idempotence limite en quelque sorte la perte d'information parce qu'elle interrompt l'action simplificatrice à la première étape. Les filtres de base de la morphologie mathématique sont l'ouverture et la fermeture. Moyennant le choix judicieux des tailles et des formes d'éléments structurants, il sera possible de construire de nouveaux filtres suffisamment sélectifs pour éliminer des objets d'une certaine taille et qui auront les orientations indiquées par l'élément structurant. Par la suite, nous prendrons la liberté d'écrire ``filtre'' en lieu et place de ``filtre algébrique''.


Marc Van Droogenbroeck. Tous droits réservés.
2003-09-30